On a voulu voir en Fragonard le chantre exclusif de l'amour, d'un monde exquis et dépravé. Une sorte de chroniqueur mondain que son génie aura toutefois sauvé des fadaises des bergeries et des coquineries dans lesquelles on identifie et résume la fin du XVIIIe siècle. C'est une vision réductrice de son œuvre. Castratrice. Si Fragonard est un chroniqueur dont l'œil a fouiné dans les alcôves les plus secrètes, les bergeries les plus « chaudes », il n'est pas qu'au service fripon d'une société qui court à sa perte. Il amorce l'élan romantique, cette fougue suicidaire qui entraîne les corps dans les passions amoureuses, conjointement à la fascination de la mort qui lui est attachée au point de la colorer de quelque tragique complaisance.